Le retour sur investissement des programmes de bien-être tarde à se matérialiser, en raison d’approches trop individuelles, qui devraient laisser la place à des interventions systémiques.

Les organisations n’ont jamais autant investi dans le bien-être. Et pourtant, les résultats concrets se font attendre.

D’ici 2026, les dépenses mondiales des entreprises pour des programmes de bien-être devraient dépasser 94,6 milliards de dollars US. Près de 85 % des grandes entreprises américaines proposent des programmes de bien-être au travail.

Mais les problèmes d’épuisement professionnel et de santé mentale ne cessent de s’aggraver. Et les améliorations attendues en matière de bien-être ne se matérialisent pas.

Le manque de résultats pourrait être causé par le fait que les organisations se concentrent sur des solutions individuelles plutôt que sur des approches globales. « Nous soutenons – sur la base d’un examen systématique des recherches récentes dans ce domaine – que le manque d’impact des programmes de bien-être [d’entreprise] s’explique en partie par l’accent mis sur l’employé individuel plutôt que sur les systèmes qui l’affectent », écrivent les chercheuses en santé mentale Jazz Croft, Acacia Parks et Ashley Whillans dans la Harvard Business Review.

Ces chercheuses exhortent les organisations à privilégier une approche systémique, en se penchant sur la gestion de la charge de travail et la formation des dirigeants aux enjeux de santé mentale. Elles les encouragent à ne plus se satisfaire des applications de bien-être et de la formation à la gestion du stress des employés, qui sont des interventions uniquement centrées sur l’individu.

L’approche systémique vise à répondre aux besoins des employés par un changement organisationnel, par exemple en proposant des horaires flexibles.

Des changements structurels devraient être proposés, accompagnés d’objectifs et d’indicateurs clairs, permettant de mesurer le réel retour des investissements. Cela suppose d’être capable de collecter les données, de les traiter et de les relier avec les performances financières de l’entreprise.

Les trois chercheurs proposent également de développer des réseaux de champion du bien-être parmi les employés, de doter les gestionnaires de connaissances en santé mentale, et d’adhérer à des normes reconnues par les investisseurs.

L’insuffisance des interventions individuelles

Pour ces chercheuses en santé mentale, les interventions individuelles négligent les causes profondes, pointent les trois chercheuses. Cela conduit à apporter des réponses superficielles. Un employé qui fait face à une charge de travail écrasante, qui bénéficie d’une application de pleine conscience et de consultations d’un thérapeute en ligne parrainées par l’entreprise, et qui ne verrait pas son stress diminuer, pourrait se sentir désespéré plutôt que soutenu.

De plus, les employés peuvent voir les interventions individuelles comme étant hypocrites, quand ils constatent eux-mêmes qu’elles ne répondent pas à leurs besoins.

Par ailleurs, les programmes d’assistance aux employés (PAE) sont peu utilisés, avec un taux d’engagement de l’ordre de 5 à 10 %, en raison de facteurs tels que la stigmatisation de la santé mentale et la mauvaise qualité du service.

Également, les interventions de bien-être centrées sur les individus ne sont tout simplement pas efficaces, comme le montre une étude de l’Université d’Oxford portant sur plus de 46 000 travailleurs dans 233 organisations.

Enfin, les employeurs ne sont pas capables de suivre les résultats des programmes individuels, ce qui les empêche d’apporter des modifications qui pourraient améliorer les services aux employés.