
Accompagné du Conseil pour la protection des malades et du Regroupement québécois des maladies orphelines, le député libéral André Fortin s’inquiète que le gouvernement resserre l’accès au programme du patient d’exception, ce qui rendrait plus difficile l’accès à des médicaments dont ces patients ont besoin.
La mesure du patient d’exception permet aux patients qui n’ont pas d’autres options de déposer une demande d’accès à des médicaments approuvés par Santé Canada, mais qui ne figurent pas sur la liste de la Régie de l’assurance maladie du Québec (RAMQ).
En point de presse, Me Paul G. Brunet, avocat et président-directeur général du Conseil pour la protection des malades, a décrié la situation. « Ce qu’on craint avec l’avènement du projet de loi 15, c’est que, ce qu’on a alourdi dans le processus d’obtention de médicaments lors de situation médicale particulière, finisse par s’appliquer en matière de patient d’exception et qu’on alourdisse ainsi le processus en invitant l’INESSS à se pencher sur le sujet », a-t-il expliqué.
L’Institut national d’excellence en santé et en services sociaux (INESSS) est l’organisme provincial responsable de l’inscription sur la liste de médicaments couverts par le régime public québécois.
« Ce qui est plutôt ironique, c’est que le projet de loi dit lui-même dans son propre titre “rendre le système de santé plus efficace”. Ironiquement, on vient l’alourdir et le rendre encore plus inefficace en matière de patient d’exception », ajoute Me Brunet.
Le ministère de la Santé a démenti qu’il voulait restreindre l’accès à des médicaments et il assure que les travaux en cours visent « l’optimisation de la mesure du patient d’exception ».
« Les travaux en cours visent à s’assurer que la mesure du patient d’exception s’appuie sur la pertinence clinique (données scientifiques en appui aux demandes). Il n’est pas dans l’intention d’abolir la mesure du patient d’exception ni de restreindre l’accès à certains médicaments en particulier », écrit le ministère dans un courriel transmis à La Presse Canadienne.
Le porte-parole de l’opposition officielle en matière de santé, André Fortin, critique lui aussi l’intention de la Coalition avenir Québec (CAQ). « Le gouvernement est venu nous dire : “on ne vient pas restreindre l’accès, ce qu’on vient faire c’est resserrer les règles parce qu’il y a de l’abus” », a commenté le libéral en point de presse.
M. Fortin doute que de nombreux patients abusent de cette mesure. « Les patients qui font l’utilisation de cette mesure, ils ont besoin des médicaments, c’est une question pour eux bien souvent de vie ou de mort. »
« De savoir que pour une question budgétaire, on va venir empêcher des Québécois d’avoir accès à des médicaments dont ils ont besoin, des médicaments qui assurent leur qualité de vie et qui assurent qu’ils demeurent en vie, c’est absolument scandalisant », a dénoncé M. Fortin.
Jonathan Pratt, directeur général du Regroupement québécois des maladies orphelines, a indiqué que la crainte d’avoir des modifications au programme du patient d’exception dure depuis 2 ans.
« On se fait dire qu’on veut resserrer les règles, mettre plus de bâtons dans les roues pour les fabricants et ultimement, ce qui risque d’arriver, c’est que ces fabricants ne viendront plus au Québec ou au Canada, et ça va réduire le nombre de médicaments disponibles aux Québécois et Québécoises », explique M. Pratt.
La mesure du patient d’exception coûte des centaines de millions de dollars par année pour sauver la vie à plus de 50 000 patients. En effet, le ministère de la Santé rappelle que la mesure du patient d’exception « est unique au Canada dans son ampleur, puisqu’elle est accessible tant pour les personnes assurées du régime public que pour celles des régimes privés ». Il précise que pour le public seulement, elle coûte 350 millions $ par année.
Selon le Regroupement québécois des maladies orphelines, il existe plus de 8000 maladies rares, ce qui exclut les cancers rares. « De ces maladies, il en existe seulement 5 % pour lesquelles on a un traitement efficace », dit-il.
Avec l’évolution dans la recherche, certains médicaments ayant une indication thérapeutique ciblée peuvent s’avérer efficaces pour d’autres conditions médicales, fait valoir M. Pratt. Pour avoir accès à ces médicaments pour une autre indication thérapeutique, la personne doit en faire la demande via la mesure du patient d’exception. M. Pratt craint que les changements prévus par le gouvernement ne viennent limiter l’accès aux médicaments dans ce contexte.