La situation de déficit permanent dans laquelle se trouvent de nombreux régimes de retraite à prestations déterminées (PD) met en péril leur survie à long terme. Pour renverser cette tendance, la création d’un fonds d’indexation et de stabilisation comme outil de gestion des risques est une solution à considérer, a démontré l’économiste Michel Lizée lors d’un colloque sur les régimes de retraite présenté lundi à Montréal par l’École nationale d’administration publique.

À priori, la recherche de stabilité des régimes PD, qui doivent verser une rente garantie aux retraités, est incompatible avec la volatilité des marchés sur lesquels ils évoluent. Pour Michel Lizée, économiste retraité des Services aux collectivités de l’UQAM, la clé est d’établir une politique de financement axée sur la sécurité, et non uniquement sur le rendement des placements.

Car en adoptant une vision à trop court terme, les régimes n’ont pas vu la nécessité de se créer une réserve pour absorber les coups durs. Selon l’économiste, les rendements au cours des 20 dernières années ont été supérieurs aux projections actuarielles. « En théorie, tous les régimes PD devraient être en surplus aujourd’hui, malgré la crise de 2008 », affirme-t-il.

Alors, comment expliquer que la majorité d’entre eux soient aujourd’hui en situation de déficit? Par manque de prévoyance, soutient M. Lizée. « Les améliorations aux prestations et les congés de cotisations consentis dans les années fastes ont mangé les surplus. Beaucoup de régimes étaient même déjà en déficit avant la crise, en 2007. On s’est comporté en cigale et non en fourmi », illustre-t-il.

L’objectif d’un fonds d’indexation et de stabilisation est donc de créer un écart entre l’actif et le passif. Le principe est simple : fixer les cotisations à un niveau plus élevé que le montant requis pour verser les prestations et indexer ces dernières seulement lorsque le régime est en bonne santé financière. Dans les périodes où le marché est moins favorable, cette marge permet d’absorber la volatilité et d’éviter que le régime ne tombe en déficit.

Le modèle des RRFS

Les fonds d’indexation font déjà partie des mécanismes de prudence des régimes de retraite par financement salarial (RRFS), où le risque de financement est entièrement assumé par les participants, puisque la cotisation de l’employeur y est fixe et ne fluctue pas en fonction des déficits actuariels. « Ces régimes ont des exigences plus élevées que les régimes PD traditionnels dans le but de protéger les participants et de renforcer leur viabilité à long terme », expose Michel Lizée.

Par exemple, dans le cas du Régime de retraite des groupes communautaires et de femmes, les prestations ne sont indexées que si la capitalisation du régime atteint 110 % ou plus. Dans le cas contraire, les surplus constituent un coussin de sécurité, ce qui permet de garder le niveau des cotisations stables et de garantir les prestations.

« Les principaux avantages de ce type de régime pour les promoteurs sont les cotisations fixes et connues d’avance, de même que la possibilité de maintenir une politique de placement plus efficace sans avoir recours aux stratégies d’appariement actif-passif », explique M. Lizée.

Pour autant, il n’est pas nécessaire de transformer un régime existant en RRFS pour bénéficier des ces avantages, puisque la loi sur les régimes complémentaires de retraite autorise les régimes PD traditionnels à instaurer une politique de fonds d’indexation et de stabilisation.

« Cette solution permet de freiner la tendance de réduire les droits des retraités. La probabilité qu’un régime soit toujours en surplus peut être très élevée. Il faut se sortir de la tête l’idée que les régimes PD sont synonymes de déficits perpétuels », conclut Michel Lizée.

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