Les infrastructures sont sans nul doute le sujet de l’heure en investissement institutionnel, et les caisses de retraite sont de plus en plus nombreuses à succomber à la tendance. Mais encore doivent-elles déterminer de quelle manière elles comptent faire leur entrée dans ce marché.

À l’heure actuelle, 36 % des investisseurs institutionnels canadiens sont exposés aux infrastructures, a souligné Guillaume Morency, gestionnaire de portefeuille, Infrastructures au Régime de rentes du Mouvement Desjardins. Lors du colloque Retraite, investissement institutionnel et finances personnelles, qui a eu lieu à Québec la semaine dernière, il a expliqué que cette catégorie d’actif a encore « beaucoup de place pour croître » dans les portefeuilles des caisses de retraite.

Les infrastructures représentent en effet l’une des catégories d’actif alternatives les moins représentées chez les investisseurs institutionnels, loin derrière l’immobilier (63 %), les placements privés (58 %), les fonds de couverture (55 %) ou encore les ressources naturelles (43 %).

Au Canada, ce sont Teachers et OMERS qui ont été les pionniers en matière d’investissement en infrastructures, au tournant des années 2000. Aujourd’hui, 16,4 % de l’actif total de OMERS est investi dans cette catégorie d’actif, une proportion largement supérieure à celle de la plupart des régimes de retraite publics (3,2 %) et privés (2,5 %) du pays. Au Régime de rentes du Mouvement Desjardins, 12,3 % de l’actif sous gestion est constitué d’infrastructures.

« Les caisses de retraite ont des cibles plus élevées, mais elles n’arrivent pas à les atteindre. Investir dans les infrastructures n’est pas un exercice simple », a soutenu M. Morency.

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Investissement direct ou indirect?

Plusieurs options s’offrent aux investisseurs institutionnels qui désirent faire leur entrée dans le monde des infrastructures. La méthode la plus simple est probablement d’investir dans une compagnie cotée en bourse œuvrant dans le secteur des infrastructures. Une telle forme d’investissement est plus liquide, mais elle est aussi davantage soumise à la volatilité des marchés. De plus, peu de sociétés offrent une exposition pure aux infrastructures, note Guillaume Morency.

Les fonds d’infrastructures cotés en bourse sont également une avenue possible, mais encore une fois, ils sont soumis aux aléas propres aux marchés publics. Pour se soustraire en partie à cette volatilité, certaines caisses de retraite ont fait le choix d’investir dans des fonds privés d’infrastructures gérés par des équipes spécialisées. Ceux-ci sont moins liquides que les fonds que l’on retrouve sur les marchés publics, mais ont l’avantage d’être moins corrélés aux marchés boursiers.

Cela dit, l’approche qui gagne le plus en popularité est l’investissement direct ou le co-investissement. En investissant directement au niveau de l’actif, les régimes de retraite se soustraient à la volatilité des marchés, au détriment de la liquidité.

Même si l’investissement direct requiert une équipe de gestion spécialisée, c’est l’approche qui obtient de plus en plus la faveur des investisseurs institutionnels. Entre 2012 et 2015, la part des investissements en infrastructures réalisés de manière directe par les investisseurs institutionnels mondiaux est passée de 29 à 48 %, alors que les fonds ont affiché un déclin de 21 % sur la même période.

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Comprendre la dynamique rendement-risque

Choisir le bon mode d’investissement est une chose, mais sélectionner les actifs dans lesquels investir en est une autre. Deux facteurs principaux influencent le profil rendement-risque d’un actif en infrastructure, explique Guillaume Morency : la dynamique des revenus et la maturité.

Les actifs qui reposent sur des contrats à long terme, comme la production d’énergie ou la gestion des déchets, sont moins risqués que les actifs dont la rentabilité est liée au PIB, comme les routes à péage ou les aéroports par exemple.

De la même façon, les infrastructures déjà en activité, qui affichent un bon historique d’exploitation, génèrent des flux monétaires prévisibles et sont donc moins risquées. La prime de risque des projets en développement ou en construction peut en revanche générer des rendements supérieurs.

Plus généralement, certains investisseurs commencent à s’inquiéter de la trop grande popularité des infrastructures, ce qui aurait pour effet de tirer les prix à la hausse. Autrement dit, paie-t-on trop cher pour cette catégorie d’actif? Pas selon Guillaume Morency.

« On s’attend à ce que les rendements s’améliorent dans les classes d’actifs bien positionnées. La clé est de rester discipliné. À mon avis, il y a encore de bons rendements à aller chercher au cours des dix prochaines années, il suffit d’être sélectif. »

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