Le régime de retraite des employés du gouvernement du Québec (RREGOP) est 41 % plus avantageux que les régimes du secteur privé et il doit être considéré comme un avantage salarial dans l’actuelle négociation avec le front commun syndical.
Dans une note préparée par l’actuaire Pierre Girardin en collaboration avec Michel Kelly-Gagnon, président-directeur général de l’Institut économique de Montréal, l’IEDM considère que la situation à la retraite des employés du secteur public est nettement plus avantageuse si on la compare à celle de la grande majorité des travailleurs du secteur privé. Par conséquent, le gouvernement doit tenir compte de ce fait avant de déterminer le niveau des hausses salariales consenties à ses employés.
« D’abord, il existe un déséquilibre flagrant dans la disponibilité des régimes de retraite au Québec : 99 % des employés du secteur public sont couverts alors que seulement 25 % des employés du secteur privé ont accès à un régime complémentaire de retraite d’après la Régie des rentes », souligne M. Girardin. « Ensuite, même parmi les travailleurs du secteur privé les plus chanceux – c’est-à-dire ceux qui sont couverts par un régime de retraite à prestations déterminées – cet avantage est bien moindre que dans le public en raison de l’absence de sécurité d’emploi.»
Deux poids, deux mesures
Une comparaison actuarielle a été effectuée entre deux travailleurs-modèles, soit un employé du secteur public et un du secteur privé – bénéficiant tous les deux des mêmes conditions salariales et de régimes de retraite identiques. La seule différence dans les hypothèses concerne le nombre d’employeurs au long de leur carrière : un seul pour le travailleur du secteur public et trois pour celui du privé (ce qui est une estimation prudente compte tenu de la réalité du marché de l’emploi).
L’hypothèse de régimes de retraite identiques, bien qu’utile pour la comparaison, est en fait presque jovialiste. En effet, rares sont les travailleurs du secteur privé qui ont le privilège d’être couverts par un régime semblable au RREGOP (le Régime de retraite des employés du gouvernement et des organismes publics). Ce dernier offre notamment une rente représentant 70 % du salaire moyen des cinq meilleures années (après 35 ans de service) et indexée à la moitié de l’inflation.
Les résultats de la comparaison sont frappants : même si le travailleur du secteur privé se voit offrir des régimes de retraite équivalents au RREGOP par ses trois employeurs, ce qui, encore une fois, est le lot d’une minorité, la valeur du régime du travailleur du secteur public sera tout de même supérieure de 41 % au moment de la retraite.
Bref, le fait d’avoir un seul employeur au cours de sa vie, une situation très inhabituelle, sauf au sein du secteur public, a un impact majeur sur le montant des fonds disponibles à la retraite. C’est sans compter le fait que ces fonds sont en sécurité puisque l’État, contrairement à une entreprise privée, risque peu d’être soumis à une faillite éventuelle.
« Cette situation n’est pas équitable pour les contribuables qui travaillent dans le secteur privé, qui paient en quelque sorte pour les régimes de retraite généreux du secteur public alors qu’eux ne profitent pas de tels avantages », remarque M. Girardin.
La publication de l’étude rappelle également que selon une étude récente de l’Institut de la statistique du Québec, les employés de l’administration publique québécoise ont une rémunération globale par heure travaillée plus élevée de 3,6 % par rapport aux travailleurs du secteur privé. La rémunération globale inclut les contributions patronales aux régimes de retraite.
« Les porte-parole du Front commun syndical se limitent à citer les différences salariales. Il faut plutôt examiner la rémunération globale pour obtenir un portrait complet. Une telle analyse montre qu’il n’y a aucun écart à combler pour les employés du secteur public par rapport à ceux du secteur privé, bien au contraire. Le gouvernement doit reconnaître cette réalité, et ce, particulièrement dans un contexte de déficits budgétaires », conclut Michel Kelly-Gagnon.
Pierre Girardin signera également un article dans notre parution d’avril à ce sujet.