C’est après un séjour en Suisse que Stéphan Lazure s’est joint à l’équipe de PBI Conseillers en actuariat. Il constate que le système de retraite de ce pays européen est assez différent de celui du Québec, mais que suffisamment de similitudes existent pour que l’actuaire québécois s’y retrouve. Cette expérience à l’étranger lui a permis d’observer certaines pratiques qui pourraient contribuer à améliorer le système de retraite de la Belle Province.

M. Lazure œuvre dans le domaine des régimes de retraite depuis plus de 20 ans. Il a pris ce virage au cours de ses études en mathématiques et a intégré le marché du travail au début des années 1990. C’était l’occasion propice de se lancer dans le secteur, car de nombreux régimes travaillaient à se conformer à la réforme de la Loi sur les régimes complémentaires de retraite. M. Lazure s’est alors retrouvé dans un cabinet d’actuaires-conseils. « Ce que j’ai apprécié le plus, c’est le fait d’être près du concret, de travailler avec de vraies personnes, dit-il. Dans le domaine de l’actuariat, c’est dans le champ de la retraite qu’on a plus l’occasion de rencontrer ceux qui utilisent notre expertise. »

La quasi-disparition des régimes à prestations déterminées (PD), particulièrement dans le secteur privé, s’est révélée le grand changement au cours des deux décennies où il a œuvré dans le secteur de la retraite. « La législation n’a pas aidé et, pendant les bonnes années, on n’a pas mis assez d’argent de côté, dit M. Lazure. L’autre raison est le fait que de plus en plus d’investisseurs exigent que les entreprises aient des rendements à court terme. Les gens n’investissent plus à long terme et il est moins intéressant d’avoir un régime PD. On ne peut pas contrôler certains facteurs, mais il y a des questions à se poser quant à leur évolution. »

De son expérience outremer, M. Lazure retient certaines stratégies qu’il vaudrait peut-être la peine d’examiner dans le cadre des discussions sur le système de retraite au Québec. Il constate que la retraite fait souvent la manchette des médias suisses – et non pas seulement en période de crise – car tous les travailleurs cotisent à un régime. « Les comités qui gèrent des régimes sont paritaires entre employés et employeurs. Les décisions se prennent donc souvent dans l’optique de la pérennité du régime et il n’y pas de dualité entre employeur et employé où chacun tire de son côté », dit-il. Un autre élément où la Suisse a eu une longueur d’avance sur le Québec réside dans la gestion des risques. « Souvent la cotisation est définie par le texte du régime et il y a des politiques qui font en sorte qu’on ne veut pas réduire les prestations, dit M. Lazure. Ceci oblige à gérer les risques à l’avance plutôt que d’être en mode réaction. » Cette gestion se traduit par des politiques de financement et la possibilité de mettre en place les ajustements nécessaires.

Le Québec pourrait aussi s’inspirer de la flexibilité accordée aux régimes suisses. « La législation laisse au comité beaucoup de latitude dans la gestion financière pour faire ce qui lui semble convenable pour le régime, constate M. Lazure. Il y a des occasions de discuter avec les législateurs québécois, afin de s’assurer qu’un régime n’est pas en crise dès qu’il y a une mauvaise année de rendement. » Il faut aussi s’assurer du professionnalisme des comités de retraite, ce qui implique de la formation. « Mais il faut que les comités adoptent des stratégies de gestion de risque pour éviter des erreurs du passé, dit-il. En s’inspirant de ce qui fonctionne ailleurs, on devrait pouvoir améliorer le système de retraite ici. »

M. Lazure souligne finalement l’importance de « faire en sorte que les régimes PD continueront d’exister, que nos enfants pourront en profiter et de défendre l’efficacité de ces régimes pour assurer un revenu adéquat à la retraite ». C’est d’ailleurs le regard sur l’avenir qui contribue à motiver M. Lazure dans son travail. « Ma plus grande source d’inspiration, je pense, ce sont mes enfants, dit-il. Ils m’obligent à rester terre à terre. Ça m’aide dans mon travail, parce que ça oblige à trouver des solutions simples et concrètes aux problèmes. » Il affirme que malgré les complications auxquelles font face de nombreuses caisses de retraite, son regard vers l’avenir demeure optimiste. « Si on veut quelque chose de positif dans le futur, on doit s’y projeter, donc au-delà de nos propres vies. Je pense que les enfants contribuent à cela, dit-il. C’est d’abord personnel, mais sur le plan professionnel aussi. Je pense qu’ils affectent notre vision des choses. »