Avec le vieillissement de la population et la pénurie de la main d’oeuvre qui se prépare, la santé des travailleurs ainsi que le coût sans cesse en hausse de l’assurance collective préoccupent tous les employeurs. Trois assureurs et deux promoteurs de régimes partagent leur vision sur le sujet.
Dans les différents sondages effectués auprès des participants de régimes, les
assurés se disent satisfaits de leur régime d’assurance collective de façon générale.
On remarque toutefois qu’ils attachent beaucoup d’importance à des couvertures comme les soins dentaires ou visuels. Or, comme ces dépenses relèvent davantage de la budgétisation que de catastrophe, on pourrait les inclure dans un compte de gestion-santé afin de mieux contrôler les coûts du régime, comme le suggère Jacques Parent, viceprésident principal, Assurance collective à l’Industrielle Alliance, Assurances et services financiers.

« Nous comprenons le dilemme auquel font face les employeurs qui doivent offrir un régime avantageux à leurs employés, mais nous devons aussi reconnaître
que les franchises sont demeurées au même niveau depuis 20 ans, dit-il. Une hausse de celles-ci permettrait aux promoteurs de régimes de mieux contrôler
leurs coûts. Certains employeurs ont mis en place des régimes flexibles pour couvrir les garanties budgétaires, ce qui est déjà un pas en avant. »

Les polices d’assurance collective jouent un rôle important pour combler les services qui ne sont pas couverts par les régimes gouvernementaux. « Certains proposent de faire un nettoyage dans les couvertures qui relèvent davantage du financement, mais il sera difficile de retirer certains droits acquis au fil des ans par les assurés, note Jean Guay, premier vice-président, Assurances collectives, Standard Life.


Carl Laflamme, vice-président, Ventes et marketing, SSQ Groupe faire financier, poursuit en disant que de nouveaux produits adaptés sont même apparus, comme les comptes d’épargne santé. « Bien que les coûts augmentent sans cesse, le besoin d’être bien assuré demeure, avance-t-il. Il faut maintenant être imaginatif pour nous adapter à la réalité des employés et des employeurs. Nous l’avons fait par la mise sur pied de régimes flexibles, de comptes de gestionsanté ainsi que de programmes de santé et mieux-être », poursuit M. Laflamme.


Comment améliorer la communication envers les participants ?


La communication demeure un élément indispensable pour responsabiliser les assurés. Tous sont unanimes : il est primordial d’informer les assurés de l’impact de leur consommation sur le coût des primes de leur assurance collective.


« Comme assureur, nous les encourageons à s’informer via notre site web, qui renferme entre autres les questions les plus fréquemment demandées à notre centre d’appels, explique M. Parent. Nous incitons aussi les assurés à considérer d’autres options disponibles, équivalentes et moins coûteuses. Par exemple, nous pouvons inscrire sur la preuve de remboursement qu’un médicament générique existe lorsqu’un assuré utilisent des médicaments d’origine. Ce genre d’initiative, combinée avec l’application des dispositions du régime telle la coassurance, contribue à responsabiliser les assurés vis-à-vis leur consommation. »


M. Laflamme soutient que les problèmes de communication viennent en partie du fait que, dans bien des cas, l’utilisateur du produit ou du service n’est pas celui qui reçoit l’information. Selon lui, il faut aussi adapter le langage employé dans les communications afin de bien se faire comprendre par les utilisateurs.
« Nous croyons trop souvent que tout le monde comprendra les nuances et les termes de notre industrie, ce qui est loin d’être le cas », avise-t-il.


M. Guay amène un autre point de vue fort intéressant. « La majorité des assurés ont une confiance aveugle envers les professionnels de la santé et remettent rarement en question leurs décisions, au sujet du médicament prescrit ou encore des tarifs, enchaîne-t-il. Les cartes-médicaments contribuent à exercer
un certain contrôle sur les coûts des médicaments, mais il importe que les assurés soient plus conscientisés ».


Il propose des mesures qui pourraient inclure des renseignements utiles à valeur ajoutée comme la liste de médicaments fréquemment prescrits et leurs équivalentsgénériques, la liste des fournisseurs de services paramédicaux dans la région ainsi que les frais médicaux admissibles.


Style de vie discutable = prime plus cher ?

Le style de vie des assurés est fréquemment rapporté dans les sondages menés auprès des employés au sujet de leur régime d’assurance collective. Nos assureurs ne sont cependant pas encore prêts faire un lien entre le style de vie et le coût de la prime des assurés.

Pour un, Jean Guay répond que de porter un jugement sur le style de vie d’une personne est un exercice qui peut être subjectif et très controversé. « Contrairement à l’assurance-vie, l’assurance collective n’est pas élaborée sur un processus de sélection individuelle, mais plutôt sur un partage des risques par une collectivité», rappelle-t-il.

M. Laflamme va plus loin: « Il faut cesser d’individualiser les régimes d’assurance collective et éviter de faire de la discrimination chez les participants de régimes. Cela deviendrait impossible à gérer. Comment pouvons-nous définir ou déterminer ceux qui mènent un style de vie sain par rapport à ceux qui mènent un style de vie discutable? », s’interroge-t-il.

M. Parent partage le même avis, enajoutant que la meilleure approche à adopter face à cette problématique est de mettre l’accent sur la prévention et d’encourager les assurés à privilégier de bonnes habitudes de vie, tout simplement.

Assurer un meilleur contrôle des coûts des soins paramédicaux

Tout comme c’est le cas avec les médicaments, le coût des soins paramédicaux connaît aussi une hausse vertigineuse année après année. Selon les assureurs, le contrôle des coûts passe par le design des régimes. Certains suggèrent d’instaurer un maximum en dollars par visite ou par année pour les soins paramédicaux.

« En tant qu’assureur, nous devons constamment procéder à des audits auprès des fournisseurs afin de prévenir les abus et les fraudes, soutient M. Guay. Il faut toutefois se rappeler qu’en moyenne 75 % du coût des primes d’assurance-santé est attribué aux médicaments, dont le coût ne cesse de monter en flèche également. Par conséquent, il ne faut surtout pas négliger la mise en place de stratégies de communication pour mieux contrôler les hausses attribuées
aux médicaments. »

M. Laflamme pense que le rôle desassureurs consiste à soutenir les promoteurs de régimes de manière à ce qu’ils puissent prendre des décisions éclairées, basées sur des rapports statistiques de leur utilisation. Il poursuit dans la même ligne de pensée que M. Guay. « Il est vrai que les coûts de soins médicaux augmentent rapidement, mais ils ne représentent qu’un faible pourcentage des coûts d’assurance collective. Le but n’est pas de réduire la couverture offerte aux employés, mais de mieux contrôler les hausses de coût. »

M. Parent pousse encore plus loin laréflexion : « Il faut non seulement s’attarder sur la consommation des assurés, mais sur les honoraires des fournisseurs de soins de santé. Il ne faut pas négliger le coût par ordonnance, qui a un impact majeur sur la hausse des coûts de façon globale. C’est pourquoi nous avons introduit des mécanismes qui encouragent les assurés à prendre l’habi-tude de magasiner les frais d’honoraires des pharmaciens », insiste-t-il.

Qu’en pensent les promoteurs?

Certains promoteurs de régimes remettent également en question le fait que les couvertures d’assurance collective offertes aux employés dépassent la notion de catastrophe. Lucie Fournier, conseillère principale en avantages sociaux, chez BCE Services corporatifs, croit que les couvertures offertes dans le correspondent aux attentes des employés dans la mesure du possible.

« Certaines couvertures, comme les soins visuels, ne sont pas de nature à répondre à des catastrophes, mais elles sont fort appréciées des employés et plutôt difficiles à modifier », dit-elle.

Selon elle, il ne faut pas oublier que l’assurance collective constitue un élément qui aide les entreprises à demeurer compétitives et qu’elle contribue, jusqu’à un certain point, à attirer et à retenir certains employés. Les employeurs devraient songer à revoir toutefois certaines couvertures accordées aux conjoints des employés, qui sont grandement subventionnées et très généreuses.

Jacques Tremblay, chef principal, Rémunération totale chez sanofiaventis mentionne de son côté qu’il est important de maximiser l’utilisation de l’argent qui est investi dans les avantages sociaux pour en contrôler les coûts, tout en répondant aux besoins des employés.

« Chez sanofi-aventis, nous avons un régime flexible qui nous permet d’offrir des choix de protection à nos employés et par la même occasion de faire un suivi sur le contrôle des coûts, déclare-t-il. Une grande proportion de nos employés travaillent au Québec. Par conséquent, il importe pour eux que leurs couvertures médicales et dentaires répondent le plus possible à leurs besoins puisque la portion du coût de la prime assumée par la compagnie pour les couvertures médicales et dentaires représente un avantage imposable. »

Un objectif commun

Les deux promoteurs de régimes interrogés avouent avoir fait beaucoup d’efforts de communication au cours des dernières années. Chez Bell, tout est maintenant accessible en ligne pour les employés. Ils peuvent donc obtenir facilement de l’information sur leur compte ainsi que sur les produits et services couverts, ou encore utiliser les différents outils interactifs disponibles en ligne.

« Nos outils sont de plus en plus utilisés par les employés. Cependant, puisque la gestion des avantages sociaux demeure un domaine relativement complexe, il reste encore beaucoup de travail à faire en matière d’éducation pour favoriser la responsabilisation de nos employés », lance Mme Fournier.

De son côté, à la suite de la création de la nouvelle entité sanofi-aventis, la société pharmaceutique a dû procédé à la refonte complète de ses avantages sociaux et elle en a profité pour mettre à jour toutes les informations relatives à l’assurance collective pour les rendre disponibles en divers formats.

« Nous avons offert des sessions d’information aux employés et présenté des seéances disponibles sur le web pour les employés qui travaillent sur la route, continue M. Tremblay. Nous avons aussi créé un lien sur notre site web avec notre assureur afin de permettre à nos employés de communiquer avec lui en cas de besoin. Nos employés nous ont d’ailleurs signalé leur grande satisfaction à l’égard des nombreux moyens de communication mis à leur disposition pour obtenir facilement de l’information sur leurs avantages sociaux. »

Un faux débat!

Les promoteurs de régimes estiment qu’associer le coût de la prime d’assu-rance au style de vie individuel constitue un sujet très délicat. « Bien que la réflexion soit fort intéressante, nous n’en sommes pas encore là, affirme Mme Fournier. Le seul endroit où nous faisons déjà une certaine ségrégation de la sorte concerne l’assurance-vie individuelle. Il est peu probable que nous allions plus loin dans cette ligne de pensée. »

La société sanofi-aventis préfère, quant à elle, miser sur des programmes de prévention et de mieux-être afin de conscientiser ses employés des bienfaits de posséder de saines habitudes de vie. Elle offre à ses employés du siège social la possibilité de subir un examen annuel à ses bureaux, ce qui leur évite bien des tracas de logistique. Cela permet ensuite aux employés de rapidement prendre les moyens nécessaires pour améliorer leur santé.

La gestion de l’absentéisme : une préoccupation pour tous

Chez Bell, la gestion de l’absentéisme constitue une priorité depuis deux ans, particulièrement dans certains secteurs d’activité plus à risque. «Nous sommes à développer plusieurs outils pour nos AVANTAGES gestionnaires, notamment sur la façon de réagir lorsqu’un employé se déclare malade, explique Mme Fournier. Les efforts dans ce domaine doivent être constants afin de sensibiliser les gestionnaires et les aider. »

Même son de cloche chez sanofiaventis, qui a créé plusieurs initiatives afin de mieux gérer cette problématique. L’une d’entre elles est d’allouer une certaine flexibilité dans les horaires de travail, ce qui est très apprécié des employés, particulièrement ceux qui ont de jeunes enfants.

Par ailleurs, la société pharmaceutique offre un programme d’aide aux employés(PAE)très avancé qui offre des services sur le mieux-être personnel des conseils en matière de santé et même des conseils de nutrition. De plus, une infirmière gère rigoureusement les dossiers d’invalidité afin de favoriser un retour au travail efficace des employés. Un médecin est enfin présent trois fois par semaine pour rencontrer les employés.

« Nos employés ne sont donc pas forcés de s’absenter pour se rendre à la clinique. Nous faisons le maximum pour les aider et, en tant qu’employeur, nous en profitons tout autant », poursuit M. Tremblay.

Contrôler les coûts des soins paramédicaux

Tout comme les coûts des médicaments, l’explosion des coûts des soins paramédicaux dans la dernière décennie, a forcé plusieurs promoteurs à mieux contrôler cet aspect de l’assurance collective.

Mme Fournier souligne que la liste de soins professionnels de santé chez Bell est plutôt restreinte et elle se limite exclusivement aux soins traditionnels. La société reçoit toutefois beaucoup de demandes pour élargir cette liste. « Nous encourageons alors nos participants à utiliser leur régime flexible pour couvrir ce genre de service, précise-t-elle. Ils peuvent donc dépenser, à leur guise, la somme dont ils disposent pour obtenir les soins ou les services qu’ils désirent. »

Sanofi-aventis privilégie, quant à elle, une stratégie qui consiste à conscientiser les employés. Lors de l’adhésion aux assurances collectives, les employés voient le coût réel de la prime pour les divers services, comme par exemple les soins médicaux et dentaires. Ils peuvent ainsi prendre conscience du coût réel des divers produits et services.

« Nous communiquons que les tarifs sont basés sur l’utilisation des services et qu’une augmentation de l’utilisation occasionne des hausses de primes. L’objectif n’est pas de restreindre l’accès aux services aux employés, mais plutôt de mieux les informer pour qu’ils deviennent de meilleurs utilisateurs par la suite », indique M. Tremblay.

Il ajoute : « Tous les soins paramédicaux sont payés suivant le principe de partage des coûts entre employés et employeurs. Nous avons aussi créé des niveaux maximum pour chacun des soins paramédicaux de manière à mieux contrôler les coûts et à éviter les abus. Le tout fonctionne très bien pour le plus grand bénéfice de chacune des parties », assure-t-il.