Les actifs réels, comme l’immobilier, les infrastructures ou les terres agricoles, occupent une place de plus en plus grande dans les portefeuilles des investisseurs institutionnels. Appréciés pour leur volatilité basse et leur faible corrélation aux marchés financiers, ces types de placements impliquent toutefois des risques bien particuliers qui ne doivent pas être négligés.
L’attrait de l’immobilier
L’intérêt des caisses de retraite pour les investissements en immobilier ne se dément pas. Mais comment peuvent-elles profiter de tout le potentiel de cette catégorie d’actif?
« Au moins 50 % du rendement en immobilier est attribuable à la géographie. Et quand je parle de géographie, je parle de pays, mais surtout de villes. L’immobilier est un marché généralement très local », a affirmé Mario D. Morroni, vice-président exécutif, Stratégie et allocation du capital chez Ivanhoé Cambridge lors d’une conférence sur les actifs réels présentée par CFA Montréal la semaine dernière.
Chez Ivanhoé Cambridge, l’immobilier permet avant tout de générer des rendements courants, mais peut également faire l’objet de stratégies plus « opportunistes » susceptibles de créer de la valeur ajoutée.
Selon M. Morroni, les principaux atouts de l’immobilier sont le profil risque-rendement attrayant, les revenus courants et stables, la protection contre l’inflation à long terme, la protection du capital et un alignement intéressant avec le passif.
Deux tendances lourdes observables à l’échelle mondiale pointent également en faveur d’une répartition plus grande en actifs immobiliers : l’urbanisation et la croissance de la classe moyenne, particulièrement dans les pays en développement.
D’autres tendances, comme la technologie, engendrent toutefois certains risques. La popularité grandissante du commerce électronique a par exemple un impact majeur sur le modèle d’affaires des centres commerciaux, alors que de nouvelles plateformes comme Airbnb chamboulent profondément le marché hôtelier.
Un bon moyen de réduire le risque global d’un portefeuille de placements immobiliers est donc de diversifier les types de propriétés détenues. Les centres commerciaux, les bureaux et les complexes multirésidentiels, pour ne nommer que ceux-là, ne sont pas tous soumis aux mêmes cycles de croissance, a expliqué M. Morroni.
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La stabilité des infrastructures
« Les infrastructures sont une catégorie d’actif extrêmement stable en raison du rôle majeur qu’elles jouent dans le bon fonctionnement de la société », a soutenu lors de la même conférence Pierre Anctil, président et chef de la direction d’Axium Infrastructure.
Qu’il s’agisse d’énergie, d’hôpitaux ou de transport, les infrastructures génèrent des revenus stables, réguliers et prévisibles, a-t-il assuré.
Les contrats à long terme comme les partenariats public-privé (PPP), qui ont généralement une durée d’au moins 30 ans, sont du bonbon pour les investisseurs. « On n’a presque pas besoin de faire de prévisions, tout est écrit dans le contrat, a indiqué M. Anctil. Seule l’inflation peut influencer le rendement, et les infrastructures offrent une bonne protection contre l’inflation. »
Cela dit, les investisseurs désireux d’intégrer des infrastructures à leur portefeuille doivent quand même être prêts à assumer certains risques propres à ce type de placements. Le cadre règlementaire serré entourant les grands projets d’infrastructure publique en est un. « Le risque règlementaire existe, mais le cadre est cohérent en général. Les investisseurs peuvent par ailleurs amenuiser ce risque en effectuant une diversification géographique de leurs actifs. Ainsi, le changement à la règlementation dans un État n’affectera pas l’ensemble du portefeuille », a souligné Pierre Anctil.
Lorsque les revenus d’un projet sont tirés de la tarification des services (péages, aéroports), le risque de volume est aussi à considérer. « Ce risque est important dans le cas d’une nouvelle route, mais beaucoup plus restreint dans le cas d’une infrastructure déjà en opération. Il n’y a pas beaucoup de volatilité en matière de volume de trafic sur l’autoroute Décarie », a-t-il donné en exemple.
La production d’énergie solaire et éolienne est quant à elle grandement tributaire des conditions météorologiques. « Les prévisions basées sur des statistiques météo calculées sur une période de 30 ans sont généralement assez fiables pour prévoir la production. Et encore une fois, la multiplication des projets permet de diminuer ce risque », a soutenu M. Anctil.
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L’émergence des terres agricoles
« Les terres agricoles sont la crème de la crème des actifs réels. Elles produisent de la nourriture, c’est à la base des besoins humains », a lancé Charles Sirois, cofondateur et président du conseil du Groupe Pangea, tout en spécifiant qu’il est extrêmement difficile d’investir dans les terres agricoles en Amérique du Nord en raison de la forte charge émotive que cela suscite.
Le modèle d’affaires de Pangea consiste en un partenariat avec les agriculteurs, duquel est créée une société de production agricole (SOA). Pangea détient 49 % des parts de la société et les agriculteurs en détiennent 51 %, tout en demeurant propriétaires de leurs terres.
La stratégie de Pangea repose sur une maximisation du rendement des terres par la réalisation d’économies d’échelle, un accès plus facile à la technologie pour les agriculteurs et un partage de l’expertise entre les différents agriculteurs et Pangea. « C’est une alliance du monde financier et agricole », a résumé Charles Sirois.
Puisque la demande pour les céréales augmente rapidement en raison de la hausse des revenus de la population mondiale, les terres agricoles constituent une catégorie d’actif prometteuse, selon le cofondateur.
Mais lorsqu’il est question d’agriculture, le risque météorologique n’est jamais bien loin. À l’image des infrastructures, une diversification géographique des terres et des cultures permet toutefois de diminuer ce risque. Car en agriculture comme en investissement, la diversification est bien souvent la clé du succès.
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