Les événements tragiques survenus au Japon ont ajouté aux préoccupations grandissantes au sujet de la vigueur de l’économie mondiale, mais ils ne devraient pas entraîner de nouvelle récession mondiale, peut-on lire dans le dernier rapport mensuel GPS de Marchés mondiaux CIBC.

Bien qu’il faudra un certain temps avant que l’information disponible permette de mesurer de façon complète et précise les répercussions des événements au Japon, tant sur le plan humain qu’économique, le rapport souligne que l’économie mondiale faisait déjà face à une incertitude accrue sur différents fronts.

«Après avoir dû composer avec des vents arrière intenses à la fin de l’année, l’économie mondiale est maintenant mise à mal par de nouveaux facteurs qui, dans certains cas, sont tout à fait imprévus», explique Peter Buchanan, économiste principal, Banque CIBC. «Bien que le risque d’une véritable récession semble toujours relativement faible, ces nouveaux faits ont tempéré l’optimisme antérieur et fait grimper, du moins pour le moment, le degré d’aversion pour le risque.

«La flambée des prix de l’essence remet en question la faisabilité de maintenir la cadence plus soutenue des dépenses de consommation aux États-Unis. Soucieux de limiter le déficit, les gouvernements des pays industrialisés sabrent dans les dépenses. De plus, la politique monétaire sur les marchés les plus performants de l’an dernier-les marchés émergents-est sur le point de se resserrer davantage, freinant la croissance alors que l’inflation dépasse les cibles officielles.»

Selon M. Buchanan, il faudrait que le prix du baril de pétrole atteigne 160 $ pour torpiller la reprise économique, scénario qu’il estime peu probable. «Il est déjà arrivé que le pétrole monte en flèche pour retomber aussitôt et, compte tenu de certains facteurs, l’histoire pourrait se répéter. Les stocks des pays industrialisés étaient adéquats quand la marmite politique au Moyen-Orient s’est mise à bouillonner.»

Il ajoute que l’économie canadienne s’accommode mieux de prix du pétrole fermes mais non exorbitants. «Le dollar canadien a suivi l’ascension des prix du pétrole lors de l’augmentation de 2008 seulement jusqu’à ce que les prix atteignent 100 $ le baril. Cela laisserait supposer que pour le Canada, l’incidence défavorable du pétrole plus cher, comme la faiblesse des partenaires commerciaux et des ventes automobiles, commence à l’emporter de plus en plus sur les rentes pétrolières, une fois que les prix franchissent le seuil des 100 $.»

S’appuyant sur une méthode de modélisation statistique standard, M. Buchanan a estimé qu’il faut environ douze mois à l’économie des États-Unis avant de ressentir pleinement les effets d’un choc pétrolier. Comme le Canada fait partie des douze principaux exportateurs mondiaux de produits pétroliers et gaziers, les prix plus élevés pour le brut entraînent, à son avis, un léger avantage pour l’économie à court terme. Une hausse des prix de 25 % – ce qui correspond grosso modo à la récente hausse – fait d’ordinaire grimper la croissance du PIB réel de quelques points à chacun des deux trimestres suivants.

Par après, les effets négatifs, y compris l’effet de frein sur les principaux partenaires commerciaux et les ventes automobiles, commencent à l’emporter sur les aspects positifs, ce qui nuit à la croissance du PIB. Après quatre ou cinq trimestres, les aspects négatifs annulent carrément les aspects positifs, et le niveau du PIB est en fait inférieur à celui qu’il aurait autrement atteint. Un autre aspect négatif est le frein de plus en plus fort lié à l’appréciation du huard sur les exportations nationales non liées à l’énergie.

Le rapport souligne également qu’en plus des prix du pétrole plus élevés, la croissance mondiale est également ralentie par les réductions budgétaires gouvernementales plus importantes, particulièrement aux États-Unis.

L’incidence négative des hausses des prix du pétrole et des réductions gouvernementales a fait baisser les prévisions de la Banque CIBC en matière de croissance du PIB aux États-Unis pour 2011 d’un dixième de point, fixant celle-ci à 2,7 %.

Un autre risque pour la croissance mondiale est lié au fait que les économies des marchés émergents intensifieront vraisemblablement les mesures de resserrement monétaire et d’autres mesures d’austérité pour contrer l’inflation et assurer une stabilité des prix à long terme.

Alors que le Canada n’est pas à l’abri des problèmes économiques affligeant l’économie mondiale, le rapport prévoit une croissance du PIB réel de 4 % au premier trimestre de 2011. Par conséquent, M. Buchanan prévoit que la Banque du Canada haussera ses taux en mai.